jeudi 10 décembre 2009

Transports urbains

La qualité du système de transports influence largement le développement économique et social des villes, où la mobilité est plus importante : si la moyenne française est de 3 déplacements par jour et par personne, ceux-ci montent en effet à 3,5 en Ile-de-France. Ces trajets s'effectuent sur des distances relativement importantes, qui varient en fonction de la taille de l'agglomération, de sa densité mais aussi de leur motif. En effet, les déplacements domicile-travail sont plus étendus. Ils représentent toutefois une part de moins en moins importante des déplacements (1/3 de ceux-ci à Lille métropole en 2006). Dès lors, la mobilité urbaine devient moins prévisible : elle est toujours rythmée par des heures de pointe en matinée et en soirée, mais la demande se dilate sur une plus grande partie de la journée, y compris pendant la nuit. Quant au transport de marchandises, qui représente 1/5 des déplacements-km en France, il se trouve de plus en plus soumis à la contrainte du juste-à-temps qui, si elle diminue les stocks, a pour effet de multiplier les trajets.

Il existe une corrélation entre le niveau de mobilité et les revenus

Peut-on satisfaire l'ensemble de la demande ? La réponse est évidemment non, et pour plusieurs raisons. Ces déplacements ont tout d'abord un coût direct important lorsqu'ils sont motorisés, lié à l'investissement initial, à l'entretien et à l'alimentation en énergie. Leur sur-utilisation entraîne ensuite de nombreux coûts indirects, que les autorités publiques tentent de mesurer à l'aide de barèmes détaillés (1) :
  • la pollution atmosphérique est le fait de de nombreuses susbstances, parmi lesquelles l'oxyde d'azote (Nox), le monoxyde de carbone (CO), l'ozone, le dioxyde de soufre (SO2) ou les particules en suspension. Entre 3 et 5% des décès pourraient leur être attribués en France (Afsse, 2004).
  • le bruit, facteur de stress, est de plus en plus pris en compte par les autorités des pays industrialisés. Dans ces derniers, près de 20% des habitants seraient exposé à un niveau sonore dépassant les 65 dB en façade, correspondant à la limite de confort de jour.
  • les gaz à effets de serre - les transports urbains représentent plus de 10% des émissions de CO2.
  • la sécurité routière - les accidents provoquent chaque année dans le monde plus d'1 million de décès et entre 20 et 50 millions de traumatismes. 90% d'entre eux surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, qui ne détiennent pourtant que la moitié du parc automobile. D'ici 2030, ils pourraient représenter la cinquième cause de décès au monde (OMS, 2009).
  • l'occupation de l'espace - la voirie représente entre 15 et 20% de la superficie des villes des pays industrialisés. Le transport routier, à travers les routes et les places de stationnement, est en effet très consommateur d'espace : à elles seules, les places de stationnement représentent 20% de la superficie de la voirie à Paris (Aubert, 2000) : le nombre de place de stationnement est en effet bien souvent supérieur à celui des voitures (1,7 place de stationnement pour une voiture en Ile-de-France). De plus, les embouteillages susceptibles de naître de l'inadéquation entre le taux de motorisation et la voirie engendrent des pertes économiques importantes.
Il importe donc de trouver un délicat équilibre entre un objectif économique, qui est la maîtrise des coûts directs et indirects, et un objectif social, qui est de permettre l'accès à tous aux transports (2). Le choix de tel ou tel mode de transport est à cet égard très important.

Part modale des déplacements urbains sur les différents continents. Source : ONU, 2003

Emissions de CO2 en g par passager selon le mode de transport

La majorité des déplacements est accomplie au moyen des modes de transport individuels motorisés. Bien que coûteux, ils offrent de souplesse au niveau des dessertes, offrent un meilleur confort que les transports en commun. Symbole de réussite sociale, la voiture devient accessible à de plus en plus de personnes dans le monde. Le cap du milliard d'automobiles vient ainsi d'être franchi en 2008 et la tendance actuelle amènerait à un doublement du parc en l'espace de cinquante ans. Les 2-roues motorisés sont également massivement employés : il y en aurait 200 millions dans le monde, dont plus de la moitié dans les pays d'Asie en développement (hors Japon), où ils ont permis à moindre coût un accroissement du taux de mobilité.

Le taux de motorisation gagne du terrain dans les pays en développement. Source : IFP

Il existe une grande variété de transports en commun, qui présentent tous l'avantage, sur le plan environnemental, d'économiser l'espace occupé et l'énergie consommée par usager : un métro peut assurer autant de trafic que 30 voies d'autoroutes. En revanche, ils représentent un investissement coûteux, qui ne peut être rentabilisé qu'en zone dense.

ModeCapacité par heure et par sensCoût initial par km (Mn €)
Train de banlieue60 000de 25 à 50
Métrode 30 000 à 50 000de 25 (au sol) à 120 (souterrain)
BRT (2x1 voie)15 000de 1 à 5
Tramwayde 8000 (tram pneu) à 12 000 (tram fer)de 15 à 20

Comme on le voit, le coût de la plupart des transports de grande capacité les destine plutôt aux villes riches. Il existe cependant des alternatives à bas coût, dont le Bus à Haut Niveau de Service (Bus Rapid Transit), mis en place pour la première fois à Curitiba, constitue probablement l'exemple le plus éclatant. Il a permis d'obtenir dans cette dernière ville un niveau de maillage très élevé pour les transports collectifs en site propre : 160 km de ligne par million d'habitant, contre 100 à Paris ou 40 à Séoul. Cependant, dans la plupart des villes, et notamment des villes du Sud, le transport collectif reste majoritairement assuré par des bus traditionnels et des minibus, dont la capacité et les nuisances environnementales se rapprochent des véhicules individuels.

Une station du BHNS de Curitiba - Source : PB Works




La marche, le vélo et les autres modes de transports "doux" sont en cours de réhabilitation dans les pays industriels. Peu gourmands en énergie, peu coûteux, ils peuvent compléter efficacement les autres modes pour des courts trajets. Dans les villes en développement, ils représentent une part importante des déplacements pour les longues distances : il n'est pas rare d'y marcher jusqu'à deux heures.

Malgré l'existence de solutions techniques à bas coût, c'est en effet du financement que dépend la qualité et la variété des transports urbains. Il s'agit pour une agglomération d'un effort financier important : de l'ordre de 1 et 2% de son produit intérieur brut. Les subventions de l'Etat central, voire les prêts des bailleurs internationaux (BIRD, BJCI...) et les Mécanismes de développement propre, permettent de soulager le budget local. Le montage de partenariats public-privé permet également de diminuer le coût de l'investissement initial et de l'exploitation : la ligne 4 du métro de Sao Paulo a ainsi été financée par le secteur privé à hauteur de 20% et a bénéficié de prêts internationaux qui ont couvert près de 2/3 de son coût. De manière générale, il importe que tous les bénéficiaires des transports urbains participent à leur financement :
  • les usagers contribuent aux dépenses de fonctionnement des transports en commun. Ils financent 25% des coûts d'exploitation en France, la moitié de ceux-ci à Hô-Chi-Minh-Ville mais représentent parfois l'unique source de financement de certains modes de transports privés (bus artisanaux...). Outre l'achat de leur véhicule, les usagers des transports routiers peuvent financer ces derniers par le biais de diverses taxes (sur la possession du véhicule, les carburants, péages...).
  • les collectivités (Etat, régions, municipalités) financent généralement les investissements initiaux. Leurs subventions de fonctionnement peuvent compenser les tarifs spéciaux accordés à certaines catégories d'usagers, à éponger les pertes en fin d'exercice mais aussi être calculées à partir d'indicateurs de performance.
  • les bénéficiaires indirects sont tout d'abord les entreprises, qui à défaut d'instaurer leur propre transport, peuvent alimenter le budget public. Le versement-transport assure ainsi près du tiers du financement des transports en France et s'ajoute au remboursement de la moitié du prix de l'abonnement. Un système plus social a été mise en place au Brésil avec le Vale Transporte, sous forme d'aides en-dessous d'un niveau de salaire. Les autorités peuvent également capter une partie de la plus-value foncière réalisée après la construction d'une infrastructure de transport, qui oscille entre 5 et 10% pour les résidences et 10 et 30% pour les commerces. Cela peut passer par l'achat anticipé des terrains, ainsi qu'à Aguas Claras au Brésil, la taxation des plus-values, utilisées pour le tramway de Dublin, ou la création de partenariats public-privé pour l'aménagement des alentours des stations, comme dans le cas de la société MTR à Hong Kong.
Les autorités tentent également de jouer sur la demande de transport, le plus souvent pour favoriser le report des véhicules individuels vers les transports en commun. Des mesures symboliques, telles que les journées sans voitures, sont ainsi l'occasion de modifier les comportements et de tester temporairement l'amélioration du cadre de vie. De nouvelles formes d'usage des véhicules individuels, tel que l'autopartage ou le covoiturage, permettent de limiter leur impact de ces derniers de manière plus pérenne : une voiture en autopartage remplace en effet entre 8 et 10 voitures. Le prix et l'offre en parkings, l'implantation de parc-relais, voire la mise en place de péages urbains, favorisent également le report modal. A Singapour, le renchérissement du péage urbain durant les heures de pointes vise à étaler la demande tout au long de la journée. L'attractivité des transports en commun dépend également beaucoup de leur confort, et de l'intégration tarifaire existant entre les différents modes. Cette dernière rend souvent nécessaire la mise en place d'une autorité organisatrice, responsable de la planification et de la tarification des transports sur une même aire métropolitaine.

(1) à l'image du rapport Boiteux en France. Rapporté au km, le coût de la pollution serait de 0,03 euro pour une voiture particulière et 0,28 euro pour les poids lourds. Celui de l'émission de CO2 serait de 0,007€. Le bruit ferait chuter de 1% la valeur des logements. Le coût de la congestion est estimé à 59 % d'une heure de salaire brut pour une heure passée dans les transports et à 0,45 euro par heure passée dans les transports pour une tonne de marchandise à haute valeur. Enfin, le coût d'une vie humaine est évalué entre 1 et 1,5 million d'euros selon que la victime utilisait une voiture particulière ou les transports en commun. De manière générale, les externalités négatives des transports urbains auraient pour l'Union européenne un coût égal à 1% du PIB.
(2) les ménages ne peuvent assurer leurs dépenses de transport au-delà de 15% de leur budget (source : Banque mondiale)

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Monde - Union internationale des transports publics
Monde - Fédération internationale de la route
Monde - Portail de la Banque mondiale consacré aux transports urbains
Monde - Annuaire de liens du Department for International Development
Monde - Coopération pour le développement et l'amélioration des transports urbains
Monde - Institute for transportation and development policy
Monde - OMS - Rapport sur la sécurité routière - 2009
Monde - IFP - Rapport sur la part modale des transports - 2009
Monde - Blog - The city fix : for sustainable urban transports
Europe - Livre vert : vers une nouvelle culture de la mobilité urbaine
Europe - Initiative Civitas
France - Groupement des autorités responsables de transport
France - Consultants : Systra - Xelis

vendredi 13 novembre 2009

Moscou


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Avec plus de 10 millions d'habitants, Moscou reste aujourd'hui une des plus importantes métropoles occidentales. Elle continue de rayonner sur une bonne part des pays de l'ancien bloc communiste.

Fondée au 12° siècle, la ville s'est développée selon un plan hélicoïdal, à partir du Kremlin. C'est ainsi que se sont progressivement urbanisés les quartiers de Belaya Gorod, puis de la rive gauche de la Moscova (17°s.). La physionomie de la ville est aujourd'hui assez caractéristique, puisqu'elle est traversée d'immenses radiales (les avenues de Lénine, Tver-Léningrad, Mojaisk, Kalouga, Koutouzov, Mir...) et ceinturée par quatre anneaux, qui marquent ses extensions successives. Aujourd'hui, la ville occupe un territoire de 1081km2 et se situe pour l'essentiel à l'intérieur d'une rocade de 109km de long, la MKAD. Cependant, l'extention de l'agglomération devrait amener à une coopération renforcée avec les autorités de l'oblast de Moscou, entité administrative distincte avec laquelle les relations restent encore empreinte de rivalité.

Entre 1900 et 1050, la ville est passée de près de 1 à 5 millions d'habitants. Elle en compterait aujourd'hui 10,5 millions, soit la majeure partie des 14 millions de l'agglomération. La population de travailleurs immigrés, non prise en compte dans les recensements, invite à rehausser ce chiffre.

Tout au long du 20° siècle, plusieurs schémas directeurs se sont succédés pour orienter cette urbanisation dans un sens ou dans l'autre. Le premier (Chestakov, 1921-1924) prévoit l'alternance de bandes urbanisées et naturelles. Le second est dû à Vladimir Sémionov et Sergey Tchersychev. Anticipant une forte croissance du trafic, il est à l'origine des radiales, véritables autoroutes urbaines, sur le plan desquelles le métro s'ajuste aussi à cette époque. Il élabore également une première ceinture verte à la périphérie. En 1947, la silhouette de la ville s'étoffe de sept gratte-ciel massifs, censées indiquer les directions du développement urbain. Mais l'embellissement cesse d'être la priorité sous Krouchtchev : on construit en masse des habitations dans les zones ouvertes à l'urbanisation. Le zonage s'accentue avec le plan suivant (Posokhin, 1971) : les quartiers périphériques sont dévolus aux loisirs. Ils s'équipent toutefois de grands immeubles collectifs allant jusqu'à 16 étages. Dans le même temps se développe un chapelet de villes satellites, dont certaines conservent leur fonction techno-scientifique (Dubna, Zelenograd...) et industrielle (Elektrostal, Chatoura...).

Le premier plan établi sous le nouveau régime en 1989, a été suivi de nombreux chantiers, menés toutefois dans une optique très libérale (1). Il a été actualisé en 2007 et propose une vision stratégique jusqu'en 2025. Préservant la majeure partie du centre ancien, il prévoit de construire à l'extérieur de la MKAD de nouveaux logements sociaux en hauteur (jusqu'à 40 étages), afin d'éviter l'étalement urbain et de marquer les limites symboliques de la ville. L'espace intersticiel serait partagé entre des zones résidentielles pour ménages aisés et de nouveaux centres tertiaires. Face à la congestion des routes existantes (2), il envisage également de renforcer l'offre de transport, et en premier lieu de transport collectif. Le métro pourrait bénéficier de 380km de lignes supplémentaires et d'un deuxième anneau de contournement (cf. carte). Il pourrait être secondé par 220km supplémentaires de lignes de tramway rapide. Le traffic routier pourrait être déporté du centre grâce à la création de deux routes transversales et à la création d'un quatrième anneau de 74km dans les limites de la ville. Un autre grand chantier concerne aussi la réhabilitation des logements. Près de deux millions de moscovites occupent en effet des habitations qui devraient être détruites.

le quartier d'affaire de Moskva-city - source : Wikimedia

La crise financière a perturbé le développement économique de Moscou, en entraînant la faillite de grands groupes immobiliers (3). En témoigne le chantier de Moskva city, le nouveau centre d'affaire dont beaucoup des tous ont été laissées inachevées. De même, beaucoup de réalisations de prestige qui devaient faire appel aux plus grands architectes internationaux ont été stoppées. Cependant, la ville demeure un acteur économique de premier rang : avec moins de 10% de la population russe, elle réalise 20% du PIB russe et accueille un tiers des investissements étrangers. De fait, le budget municipal avoisine celui des grandes métropoles occidentales (4) Son économie est de moins en moins industrielle et les autorités fédérales ambitionnent d'en faire d'ici 2020 une des premières places financières européennes. La ville a également voulu se doter avec Skolkovo d'une école de management de rang international. Elle devrait enfin renforcer sa position de carrefour de communications, avec la création d'un nouveau terminal à l'aéroport de Chérémétiévo et, à plus long terme, d'une gare internationale à Moskva city.

(1) beaucoup de bâtiments ont été rénovés dans la zone centrale, mais pour accueillir avant tout des bureaux, plus rentables aux yeux des investisseurs.
(2) alors qu'il y a en 2009 près de 3,5 millions d'automobiles, la voirie n'occupe que 10 à 15% de la surface de la ville, contre 20% en moyenne en Europe
(3) Mirax, AFI Development
(4) les revenus de la ville de Moscou s'élevaient à près de 1000 milliards de roubles en 2008, soit un peu moins de 30 milliards d'euros.

jeudi 13 août 2009

Dubaï


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Forte d'à peine 1,2 millions d'habitants, la ville de Dubaï sait faire parler d'elle autant que les plus grandes métropoles mondiales. Ce qui n'était au début du siècle qu'un port vivant principalement du commerce de l'or et des perles rassemble aujourd'hui sur son territoire plus de 500 gratte-ciel aux formes toujours plus audacieuses. C'est qu'elle a su s'affirmer aux yeux des touristes et des investisseurs comme une destination privilégiée et sans véritable concurrents dans un Moyen-Orient troublé.

Population de la ville de Dubaï, en milliers. Source : ONU, 2007

L'émirat de Dubaï fut fondé en 1833 par la dynastie des Al-Maktoum, qui le dirige toujours à l'heure actuelle. Avec 3 885 km2, il est le deuxième plus grand des sept Etats composant les Emirats arabes unis, derrière celui d'Abu Dhabi (1). Le désert du Rub al Khali occupe la majeure partie du territoire. La ville s'étire à partir de son site originel (le bras de mer appelé Khor Dubaï) sur une bande d'une dizaine de kilomètres de large entre la mer et le désert. Avec les villes de Charjah et Ajman, elle forme une agglomération de 2 033 787 habitants en 2006. La route du Sheikh Zayed en constitue l'axe majeur, autour duquel se sont établis la plupart des gratte-ciel. La fin de l'extension de la ville est planifiée en 2020. C'est à cette date que la transition économique de l'émirat vers le commerce et le tourisme de luxe devrait être achevée.

Vue d'artiste de la tour Burj Dubaï (808 mètres)

Contrairement à celle des Etats voisins, l'économie locale ne pouvait en effet reposer sur la rente des hydrocarbures, qui représentait moins de 5% du PIB actuellement (contre 10% en 2000). Le commerce, le BTP, le transport, le tourisme et les finances représentent les nouveaux moteurs de la croissance. Dubai s'est en effet imposée comme une vaste plate-forme de réexportation. Une dizaine de zones franches plus ou moins spécialisées, parmi lesquelles celle de Jebel Ali, forte de 6000 implantations, ont ainsi vu le jour. Le secteur immobilier a pris son essor, grâce à deux grandes entreprises, à l'origine des principaux projets de la ville. Eemar properties a ainsi piloté ceux de la Marina, du Dubai Mall ou de la tour Burj Dubai, tandis que Nakheel a réalisé les ensembles d'îles artificielles The World et The Palms. La crise des subprimes a cependant fait chuter les prix immobiliers de près de 40%, annulant les profits réalisés par ces entreprises depuis le début des années 2000. Elles demeurent cependant des piliers de l'économie locale. L'attractivité touristique de Dubaï doit beaucoup à leurs projets qui se parent de tous les superlatifs : hôtel le plus luxueux du monde, tour la plus haute, plus grand shopping mall... Des manifestations d'envergure internationale, telles que le Dubai shopping festival ou le salon technologique Gitex, participent à la renommée de la ville. Près de 15 millions de visiteurs sont ainsi attendus en 2010, et ce chiffre devrait augmenter plus rapidement après la mise en place de nouvelles infrastructures.

Les îles artificielles de Dubaï, telles qu'elles devraient être à leur réalisation

Un nouvel aéroport international est en effet en construction, alors que l'actuel ne fonctionne pas encore à sa pleine capacité (70 millions de passagers par an). Localisé à Jebel Ali, il sera intégré à un complexe logistique et à la zone franche. Le trafic maritime est intense : les ports de Hamriya et de la crique captent les flux commerciaux à destination du Golfe tandis que les terminaux de Jebel Ali et de Port Rashid en font le 10 ème port à conteneurs du monde. Les liaisons urbaines s'appuient principalement sur la route, mais le réseau de transports en commun devrait être renforcé avec l'arrivée progressive de 2 lignes de métro d'ici 2013 et de 7 lignes de monorail. Pour financer d'autres aménagements tels que le tunnel d'Al Shindagha, la ville a récemment instauré un télépéage. L'émirat doit également engager de lourds investissements en infrastructure, du fait de l'augmentation rapide des besoins en énergie (+ 15% en 2008), en traitement des déchets (11,3 millions de tonnes en 2005 contre 6,6 en 2003, soit 1676 tonnes par an et par habitant) et en eau potable.

Le développement rapide de Dubaï pourrait avoir des conséquences environnementales importantes. Les îles artificielles ont amené un recul du front de mer et pourraient menacer la biodiversité locale. Des efforts peuvent être fournis concernant la maîtrise des consommations et le recyclage (le taux actuel est proche de 5%).

La population dubaïote est constituée pour les deux tiers d'étrangers : on compte parmi ceux-ci près de 100 000 hommes d'affaires, mais il s'agit pour l'essentiel d'ouvriers du bâtiment, en provenance d'Inde et des Etats avoisinants, et dont les conditions de travail s'avèrent éprouvantes. Ceci explique qu'elle soit largement masculine, à plus de 70%. Dubaï se distingue des autres émirats par une application moins stricte des préceptes de l'islam (alcool, habits féminins...) et une relative liberté de culte. Cependant, cette diversité ne transparait pas dans la vie quotidienne à Dubaï : les centres commerciaux semblent être parmi les rares endroits où peuvent se cotoyer hommes et femmes, émiratis et étrangers.

(1) C'est à ce titre que, en vertu d'un compromis tacite, l'émir de Dubaï est également vice-président des Emirats arabes unis.

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Sylviane Tabarly, Dubaï, territoire d'un nouveau type dans le monde arabe, Géoconfluences, 2005
Le plan stratégique de Dubaï pour 2015 au format pdf.
Gestionnaires de réseaux : Suez, Palm Water LLC

mercredi 20 mai 2009

L'architecture écologique

Une maison passive à Darmstadt

Même si leurs créations ne sont pas éternelles, les architectes ont un grand rôle à jouer vis-à-vis du développement durable. Une preuve en est la floraison de labels, au premier rang desquels figure le célèbre HQE. Que signifient ces derniers et dans quels domaines l'architecture peut-elle exercer un impact positif ?

La qualité environnementale est attestée par les labels suivants :
Efficacité énergétique

En Europe, le secteur du bâtiment représente le principal consommateur d'énergie primaire (40%). Le but principal d'une construction durable est donc de consommer le moins d'énergie possible tout au long de son cycle de vie, et éventuellement d'en produire en surplus. Pour cela, l'architecte peut agir sur un certain nombre de paramètres :
  • L'isolation des combles et des murs permet de réduire la consommation de 10 à 20%. Celle du plancher offre une réduction de 5% en moyenne. L'isolation des fenêtres peut être renforcée grâce à des vitres à rendement, remplies d'un gaz inerte ou recouvertes d'un revêtement spécial. L'étanchéité à l'air doit également être surveillée.
  • Toujours afin de limiter les déperditions d'énergie, la surface d'enveloppe peut être diminuée. Cela impose des contraintes en termes de formes architecturales. Dans certains cas, une partie du bâtiment peut être enfouie sous terre.
  • L'approvisionnement en énergie peut être diversifié afin de laisser une plus grande part aux énergies renouvelables, voire d'assurer l'autonomie énergétique du bâtiment. Ainsi, un chauffe-eau solaire permet de subvenir à plus de 50% des besoins en eau chaude.La filière bois s'avère également prometteuse, dans la mesure où elle offre des rendements élevés. Les éoliennes représentent quant à elles des infrastructures plus lourdes. Cependant, la mise au point d'éoliennes verticales pourrait faciliter leur installation en milieu urbain. L'énergie géothermique permet quant à elle de réguler la température en été et en hiver grâce à des systèmes tels que le puits canadien ou le puits provençal.
  • On peut tenir compte du site pour la disposition des pièces, la localisation des ouvertures (on recommande en moyenne plus de 40% de la surface vitrée sur la surface Sud) et des arbres (les feuillus permettent en effet d'optimiser l'apport énergétique entre l'hiver et l'été).
  • Enfin, il est important de limiter la consommation électrique des appareils ménagers :
Au niveau européen, la directive pour la performance énergétique des bâtiments, en vigueur depuis 2006, vise à réduire la consommation des bâtiments de 20% en 2020 par rapport à 1990. En France, c'est la réglementation thermique 2005 qui en constitue la transposition, avant que la future RT 2010 ne devienne à son tour la norme. Cependant, les bâtiments dépassant les exigences de la RT peuvent voir leur qualité énergétique certifiée par les labels suivants :
  • Haute performance énergétique (HPE) et Très haute performance énergétique (THPE), qui attestent d'une consommation respectivement inférieure de 10% et 20% par rapport à la valeur de la RT.
  • HPE Energies renouvelables signale une proportion d'énergies renouvelables supérieure à 50% pour l'énergie de chauffage et 60% pour l'énergie. Le label THPE Energies renouvelables signale en outre une consommation inférieure de 30% par rapport à une valeur de référence. Son attribution permet un dépassement du COS de 20%.
  • Bâtiment basse consommation, qui fixe une limite de consommation (50kWhEP/m2/an pour les logements neufs, seuil pouvant être atteint en retenant les énergies renouvelables à hauteur de 12kWhEP/m2/an) et des exigences de perméabilité. Pour les bâtiments non résidentiels neufs et rénovés, le seuil de consommation doit être respectivement inférieur de 50% et 40% à la valeur de la RT. L'attribution de ce label permet un dépassement du COS de 20%.
  • le label Maison passive est quant à lui décerné par l'Institut PassivHaus. Il s'applique aux bâtiments nécessitant moins de 15kWh/m2/an de chauffage, consommant moins de 120kWhEP/m2/an (en tenant compte des appareils électroménagers) et répondant à des normes d'étanchéité.
  • le label BEPOS (Bâtiment à énergie positive), encore à l'étude, signalerait qu'un bâtiment produit suffisamment, voire plus d'énergie qu'il n'en consomme.
Gestion de l'eau

Bien que cela ne représente pas toujours un investissement rentable étant donné la modicité du prix de l'eau, les bâtiments écologiques visent à optimiser le circuit de l'eau :
  • de nombreux systèmes de récupération des eaux de pluies peuvent être mis en place, à l'instar des citernes couplées à un groupe hydrophore. Les toitures végétales en favorisent la collecte et la purification.
  • les eaux usées peuvent également être recyclées pour servir à diverses activités (arrosage des plantes, nettoyage, etc...).
  • de plus, des économies d'eau importantes peuvent être obtenues au moyens d'installations telles que les toilettes sèches.
Gestion des déchets

La gestion des déchets dépend en grande partie de la vigilance des usagers. Toutefois, les bâtiments peuvent intégrer dès leur conception un système de tri sélectif et de compostage, ce dernier permettant de valoriser près de 30% des déchets ménagers.

Réduction des gaz à effets de serre

Le secteur du bâtiment est responsable de 20% des émissions de CO2 en Europe. Il est possible de les réduire en recourant à des énergies "propres", non issues de la combustion.

Confort et santé

Si la santé des usagers doit être prise en compte, il faut aussi veiller à ce que le chantier lui-même soit "propre". Pour cela, on peut veiller à limiter les composants dangereux, tels que les composés organiques volatils (COV) et les formaldéhydes présents dans certaines peintures.
En ce qui concerne le confort, les constructions écologiques doivent offrir des aménités comparables aux bâtiments classiques (en terme d'éclairage, de température, d'esthétique...), tout en respectant les impératifs évoqués ci-dessus, ce qui nécessite encore des efforts de recherche.

Choix des matériaux

La vogue de l'architecture durable amène à s'intéresser à une large variété de matériaux. Ainsi, le liège, la fibre de bois, le chanvre et la laine disposent de bonnes propriétés isolantes, comparables à celle de la laine minérale. La paille, le bambou, la toile font également l'objet d'expérimentations. Il apparaît enfin que certains matériaux souffrent d'un bilan énergétique important lors de leur fabrication : il est alors préférable de leur trouver un substitut. Ainsi le parpaing peut-il être avantageusement remplacé par des briques creuses de type monomur. De manière générale, l'usage de matériaux recyclés et recyclables permet d'optimiser le bilan énergétique final des constructions.

Des constructions accessibles à tous ?

Le surcoût d'une maison passive est théoriquement de 7 à 15% avec des matériaux classiques, mais s'établit en fait à 20% dans le cadre d'une démarche environnementale. Le retour sur investissement est estimé entre 10 et 20 ans. Les aides publiques permettent d'en raccourcir le délai : en France, en plus de taux réduits de TVA lors de l'acquisition des équipements, des crédits d'impôts ont été instaurés pour certains équipements(25% à 40% pour l'isolation, 15% pour un groupe hydrophore, 40% pour un plancher solaire, 40% pour un puit canadien...).
On peut également espérer que l'augmentation future de la demande provoque une baisse des coûts. Quelques entreprises du bâtiment ont déjà investi le secteur des constructions écologiques ou de haute qualité énergétique. On peut ainsi citer Ideal Homes (maison zero energy de 150m2 proposées à 200 000$ aux Etats-Unis) ou les maisons Phénix (maison du bon sens de 100m2, labellisées HQE et commercialisées à 125 000 €).

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Habitat passif (Wikipédia)
Programme Cepheus de l'UE soutenant l'habitat passif
Un site consacré à la rénovation écologique
Office canadien de l'efficacité énergétique
Certivéa (certification des bâtiments tertiaires)
Cerqual (certification des logements collectifs)
Cequami (certification des logements individuels)
Promotelec (certification des logements individuels et collectifs)
Association pour la certification des matériaux isolants
Fabricants d'installations solaires : Novi-Case, Imerys, Solar Composites, ...
Fabricants d'éoliennes : Gual industries, ...

jeudi 14 mai 2009

François Ascher, Grand Prix de l'urbanisme 2009

Le Grand Prix de l'urbanisme distingue depuis 1989 le travail de professionnels d'horizons divers. La composition éclectique du jury (élus locaux, journalistes, architectes, paysagistes, aménageurs, administrateurs... dont deux personnalités étrangères) témoigne de l'étendue des compétences que recquiert l'aménagement des villes.

Cette année, il revient pour la première fois à un chercheur en la personne de François Ascher. Une partie importante de la carrière a été consacrée à la prospective (auprès du PUCA, de la DATAR, du centre d'expérimentation du BTP, de l'Institut pour la ville en mouvement...) et à l'enseignement universitaire (à l'Institut français d'urbanisme). Dans Metapolis ou l'avenir des villes (1995), il s'était penché, entre autres, sur l'éclatement spatial des activités urbaines. Avec Les nouveaux compromis urbains. Lexique de la ville plurielle (2008), il a présenté une cinquantaine de questions urbaines et la manière dont elles sont traversées par des exigences " sociales, économiques, environnementales et esthétiques".

lundi 11 mai 2009

Le logement

Lorsqu'on parle de qualité de vie, le logement figure bien évidemment au centre des préoccupations. En témoigne sa place dans le budget des ménages : les Français consacrent en moyenne 25% de leurs revenus aux seuls loyers ou au remboursement de leur emprunt immobilier. Si l'on inclut même les dépenses induites par le logement (impôts locaux, ameublement, frais de transports...), le logement pèse pour la moitié de celui-ci.

Le logement suscite des attentes fortes, que Christian Julienne (1) résume en 10 points :
  • l'accession à la propriété est un souhait majoritaire, partagé par "95% ou plus [des] hommes qui ont décidé de s'intégrer dans une vie familiale, sociale et professionnelle". Etre propriétaire, c'est en effet disposer de plus de droits que le locataire. Seules un petit nombre de personnes y renonceraient, soit qu'elles disposent d'autres sécurités matérielles, soit à l'inverse qu'elles hésitent devant un endettement trop important. Enfin, à l'échelle de la collectivité, la propriété offre de meilleures garanties d'entretien du patrimoine immobilier.
  • la demande locative reste importante, car elle est le fait d'une population mobile (étudiants, jeunes actifs de moins de 34 ans, âge moyen d'accession à la propriété) qui représente 1,7 millions de ménages (soit près de 7% du total). Le marché de la location, pour se développer, nécessite des incitations en faveur des propriétaires (que la longueur des procédures contentieuses incite parfois à garder leur logement vacant) et un allégement des frais de transaction, deux fois plus élevés qu'aux Etats-Unis.
  • un ancrage territorial (racines familiales, intérêt pour la culture locale, ...) que des opérations d'urbanisme de trop grande ampleur risquent de malmener.
  • d'où une demande d'urbanisme "historique et corporel", capable d'oeuvrer avec délicatesse dans les zones de faible densité où s'effectue l'urbanisation. Il s'agit de créer des pôles de centralité tout en ménageant la distinction public/privé au sein de l'unité urbaine de base (10 à 30 familles).
  • parallèlement à ce désir figure celui d'une architecture "douce", classique, qui conserve éventuellement des caractéristiques régionales, qui soit en un mot "habitable" par la majorité des gens. Le modernisme n'en est pas rejeté pour autant mais s'appliquerait mieux aux équipements collectifs.
  • un grand nombre de personnes souhaite habiter dans des maisons. Leur proportion dépasse 35% en région parisienne, 50% dans les agglomérations millionaires et atteint 70% dans celles de plus de 150 000 habitants. L'enquête logement de l'INSEE fait état d'un taux de satisfaction plus élevé chez les habitants de maisons individuelles (87% contre 68% en moyenne), ce qui s'explique par la superficie, la présence d'un jardin, l'environnement immédiat ainsi que l'aspect patrimonial. Cette demande semble a priori incompatible avec l'offre d'espace réduite dans les villes, mais de nouvelles formes d'habitat individuel urbain peuvent être inventées.
  • une "demande de nature associée à une demande de ville". Concilier les deux demande un travail important sur les formes urbaines (balcons, toits-terrasses) et sur les espaces verts. De nombreuses réalisations pourraient servir d'exemple, et Christian Julienne de citer en exemple le programme de coeur de ville du Plessis-Robinson, qui en dépit d'un surcoût de 10%, a trouvé très rapidement acquéreur.
le coeur de ville du Plessis-Robinson (92), lauréat en 2008 du prix Rotthier pour la reconstruction de la ville
  • une demande d'espace : on est passé depuis les années 70 d'une moyenne de 24 à 37m2 par personne. L'existence d'une grande surface habitable est déterminante dans près de la moitié des cas, si l'on en juge par les enquêtes aurpès d'acheteurs potentiels.
  • une demande de modulabilité, en fonction des besoins de ses habitants succesifs. Certains éléments de la maison (garages, terrasses, loggias) se plient assez bien à cette demande. On peut également envisager des formes urbaines facilitant l'extension de l'habitat à mesure que la famille s'agrandit. De même, le désir est grand de personnaliser son logement (peintures, jardin, etc...).
  • des services de proximité à une distance plus ou moins importante : 300m à 1km pour l'école primaire et le commerce de dépannage, 1 à 4km pour le collège, le médecin, les commerces non quotidiens, 4 à 8km pour les centres commerciaux, 8 à 20km pour les déplacements domicile-travail, une distance plus grande étant acceptée dans les agglomérations de Paris, Lyon ou Marseille.
(1) Logement, solutions pour une crise fabriquée, Les Belles Lettres, 2006

dimanche 26 avril 2009

Les services urbains dans les villes en développement

chiffoniers à Khartoum (source : UNEP)

A peu près la moitié des citadins du monde n'ont pas accès aux services urbains de base, à savoir l'eau potable (1), l'assainissement, le traitement des déchets et l'approvisionnement en énergie. Or, les investissements dans de telles infrastructures engendrent souvent des effets de leviers considérables : une dépense d'1 dollar pour améliorer l'accès à l'eau se traduit ainsi par des gains de 3 à 34 dollars (UNICEF).

Concernant la maîtrise d'ouvrage de ces infrastructures, il apparaît de plus en plus nettement que l'échelon local est le plus qualifié : les particularités locales sont mieux prises en compte et l'on diminue les aléas bureaucratiques. Aussi est-il important que les bailleurs acceptent de prêter à des collectivités locales plutôt qu'aux seuls Etats.

La gestion de ces services peut être du ressort des autorités publiques, entièrement privatisée, ou faire l'objet d'une formule mixte (construction-exploitation-transfert, concession, contrat de gestion, crédit-bail). Le partenariat public-privé peut se révéler avantageux, car les acteurs privés peuvent résoudre la question du financement, améliorer le niveau technique des infrastructures et rationaliser leur gestion. Le partenariat ne peut toutefois être durable que si les responsabilité des acteurs soient clairement encadrées, tant en ce qui concerne le calendrier des investissements, le financement, les normes de qualité ou les tarifs.


Afficher Gestion déléguée des services urbains sur une carte plus grande

Le calendrier de mise en place de ces infrastructures doit concilier qualité de service, rentabilité et couverture extensive de la population. Dans les quartiers les moins solvables, leur développement est souvent plus lent, mais il est souhaitable qu'un service minimum soit garanti. On peut ainsi adapter le maillage du réseau de manière à ce qu'il offre en certains points un accès semi-collectif, ce qui permet à plusieurs personnes d'en partager les frais . A Bengalore, il est par exemple possible d'ouvrir un accès en eau pour 8 à 12 personnes dans les zones très peuplées. Les gestionnaires se penchent également sur la possibilité d'installer en certains endroits des installations décentralisées, c'est-à-dire non connectées au réseau, afin de maintenir à faible coût une certaine qualité de service. Pour ce qui est de l'accès à l'eau potable, ce peuvent être des modules de purification (2). Mais la gestion des services peut souvent se faire de manière autonome et partir de l'existant. Ainsi, l'assainissement des eaux peut être laissé à des personnes privés, le rôle des autorités consistant à agir le long de la filière pour en limiter les externalités négatives, en subventionnant l'amélioration des fosses, en réglementant la profession de vidangeur, ou en veillant à ce que les boues soient transférées vers des stations de traitement. De même, dans certains districts de Port-au-Prince, l'opérateur public a délégué la gestion des fontaines à des comités de résidents, qui sont en mesure d'accéder au service grâce aux économies de main d'oeuvre.

D'importantes économies peuvent être réalisées à travers la maintenance du réseau. Dans les régions méditerranéennes, on estime à 25% les pertes du réseau de distribution en eau. A Rabat et à Tunis, il a été possible de réduire ces dernières de 10% grâce à des programmes ciblés.

Enfin, la valorisation des sous-produit peut contribuer à assurer le financement des infrastructures de services. Ainsi, les eaux usées peuvent être utilisées pour les besoins de l'agriculture : elles couvrent 15% de ces besoins en Israël et en Egypte.

(1) 95% des citadins ont accès à l'eau potable et 80% bénéficient de l'assainissement (Banque mondiale, 2004).
(2) le module Naïade, dont le prix d'achat est de 3800 €, peut assurer les besoins quotidiens en eau d'une communauté de 500 habitants, c'est-à-dire 2500 litres par jour. Life straw est quant à lui un purificateur à l'échelle individuelle ou familiale.

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Analyse de six expériences de gestion déléguée par l'ISTED
Institut de la gestion déléguée
Banque mondiale

mercredi 15 avril 2009

Ecovilles et écoquartiers

conçu par l'équipe de Bill Dunster, le quartier de BedZed (pour Beddington Zero (Fossil) Energy Development) à Londres regroupe 100 logements. Le projet a permis de diminuer de 50% l'empreinte écologique par rapport à la ville de Londres, soit 2,88 ha globaux par personne.

La révolution écologique se fera dans les villes ou ne se fera pas. C'est en tout cas le constat qu'amènent les chiffres suivants : les villes rassemblent aujourd'hui 50% de la population mondiale sur 2% de la surface terrestre, mais elles concentrent 80% des émissions de CO2 et consomment 75% de l'énergie mondiale. Ces statistiques globales masquent bien évidemment une grande diversité de cas. Certaines villes se révèlent ainsi bien moins polluantes que les autres : à New York, les rejets de CO2 par habitant sont inférieurs d'un tiers à la moyenne américaine tandis qu'à Sao Paulo, Rio, Londres, Barcelone et Tokyo, ils sont inférieurs de moitié à la moyenne nationale. Certes, ces différences s'expliquent en partie par la localisation des industries polluantes : à l'échelle mondiale, elles ont reflué vers les pays en développement tels que la Chine (1). Mais beaucoup de ces métropoles ont également mis en place des stratégies de développement durable (2), qui sont autant d'exemples à suivre pour réduire l'impact environnemental de l'urbanisation.

Une ville "durable" doit satisfaire à plusieurs objectifs, parmi lesquels certains sont mesurables (réduction des gaz à effet de serre et de la pollution en général, économies d'énergie, maintien de la biodiversité,...) et d'autres moins, mais tout aussi importants pour le bien-être (qualité du paysage, absence de tensions sur les circuits économiques, ...). Le WWF les a formalisé en 10 principes.

la future ville de Masdar serait dotée d'un réseau de véhicules électrique remplaçant les voitures

Peut-être les ambitieux projets de villes vertes à proximité d'Abu-Dhabi à Masdar (3), de Shanghaï à Dongtan (4) ou de Tianjin sont-ils le mieux placés pour les respecter. Si elles recourent à des principes de l'urbanisme traditionnel, comme l'établissement de rues ombragées à Masdar, elles contiennent nombre d'innovations technologiques, telles que des capteurs solaires et des éoliennes intégrés aux bâtiments, un réseau de mini-tramways électriques remplaçant les automobiles à Masdar. Si ces projets peuvent avoir vocation à préfigurer les villes de l'avenir, ils n'apportent pas l'ensemble des réponses aux défis environnementaux que connaissent les métropoles actuellement, et où il faut partir de l'existant. Les expérimentations effectuées dans de très nombreux écoquartiers à travers le monde pourraient donc s'avérer bien plus bénéfiques dans l'immédiat. On peut citer BedZed à Londres, Vesterbro à Copenhague, Kronsberg à Hanovre, Vauban à Fribourg, Métamorphose à Lausanne ou bientôt les Batignolles à Paris... Essayons d'en tracer les principaux axes :
  • les transports sont responsables de 30% des émissions de CO2 en France (5). Afin de les réduire, les déplacements doivent être réduits à la portion congrue. On évoque ainsi un idéal de 10mn de trajet à pied pour accéder aux services quotidiens (6), ce qui implique souvent une densification de l'habitat. La priorité peut être accordée aux transports collectifs, à l'autopartage et aux modes de déplacement doux (marche et vélo). Certaines mesures plus coercitives pourraient également contribuer à ces objectifs (péages ou interdiction des flux automobiles en centre-ville...). Le développement d'un système agricole dans l'espace urbain ou périurbain immédiat (jardins partagés, tours agricoles...) pourrait lui aussi limiter considérablement l'usage des transports.
  • l'industrie provoque 20% des émissions de CO2 en France, et 36% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. L'adoption de standards plus sévères pourrait entraîner dans les villes en développement des réductions d'émission, comme on l'a enregistré dans les pays industrialisés.
  • les bâtiments sont responsables de 20% des émissions de CO2 en France, essentiellement (70%) en raison du chauffage. L'isolation thermique, l'adoption d'appareils de chauffage équipés de filtres ou à énergie "propre" sont quelques-unes des solutions envisageables pour diminuer ces émissions et réaliser des économies d'énergie.
  • la production d'énergie entraîne 13% des émissions de CO2 en France. Le recours à des sources d'énergies propres et renouvelables (éolien, photovoltaïque, géothermie, bio-gaz issus de l'assainissement des eaux usées...) est d'autant plus envisageable que la taille des villes permet de réaliser d'importantes économies d'échelle.
  • la diminution des des déchets ménagers (ils sont produits à hauteur de 1kg par habitant et par jour à Paris) et leur recyclage permet de diminuer la pollution et de réaliser des économies d'énergie. Leur gestion nécessite des investissements importants. Toutefois, la collecte et le tri par pneumatique devrait être expérimenté à partir de 2014 dans le futur écoquartier des Batignolles à Paris.
  • la consommation d'eau peut-être diminuée par la récupération des eaux de pluies. Le circuit des eaux peut également être optimisé afin que celles-ci servent par exemple à l'agriculture, comme cela devrait être le cas à Masdar.
  • la sauvegarde des espaces naturels (espaces aquatiques, boisés, littoraux, montagnards...) est un aspect très important de cette démarche. Elle préserve la biodiversité et la qualité de vie des riverains. Le couvert végétal permet d'équilibrer le bilan carbone, d'annuler l'effet des îlots de chaleurs urbains (7) et peut également jouer un rôle préventif contre certains risques naturels tels que les inondations. Aussi, de nombreux aménageurs recherchent aujourd'hui l'interpénétration des milieux urbain et naturels, à travers la réouverture des cours d'eaux urbains ou encore la végétalisation des murs et des toitures. En France, où 4,8% du territoire a été artificialisé entre 1990 et 2000, la question de l'insertion de l'espace périurbain dans l'espace naturel est primordiale.
  • il est important de rendre les écoquartiers économiquement accessibles à tous, et par conséquent de modérer le prix des logements. Le surcoût ne devrait ainsi pas dépasser 20%. Cependant, l'objectif de mixité sociale reste difficile à atteindre : 75% des habitants du quartier Vauban sont par exemple des cadres supérieurs ou exercent des professions libérales. Les écoquartiers, peut-être parce qu'ils sont nombreux à naître à l'initiative des habitants, n'en sont pas moins des lieux innovants en matière de gouvernance : la ville de Fribourg a ainsi largement financé le processus de concertation dans le quartier Vauban.
On peut ainsi imaginer une multitude de mesures mais aucune d'entre elles ne peut entraîner seule un retournement de tendance. Les mener de front nécessite donc une très forte coordination des acteurs, qu'il s'agisse de diffuser les bonnes pratiques ou de sensibiliser les populations.
A l'échelle mondiale, cette coordination est assurée par des organismes tels que le programme ONU-Habitat, la Banque mondiale, l'OCDE, des associations de collectivités locales (ICLEI, CGLU, Metropolis, Sustainable cities...) ou des instituts de recherche (IIED, ...).
L'Union européenne, à travers le programme LIFE+, finance des projets en faveur de l'environnement urbain. Elle soutient également les réseaux d'acteurs locaux (Eurocités, Campagne des villes européennes durables...) avec le programme URBACT, qui s'attache à établir des réseaux thématiques entre plus de 200 villes.
En France, les collectivités locales sont incitées depuis 2004 à élaborer des Plans climats territoriaux avec l'aide de l'ADEME. Le Grenelle de l'environnement (octobre 2007), dont une première loi de programme a été adoptée en février 2009, a donné lieu à de nombreuses annonces en ce qui concerne les transports, le bâtiment ou le traitement des déchets. Mais c'est le plan Ville durable, annoncé en octobre 2008, qui traite explicitement la question urbaine : il prévoit des aides supplémentaires pour quelques villes dans le cadre de la démarche EcoCités (8) et la création, d'ici 2012, d'au moins un Ecoquartier "dans toutes les communes qui ont des programmes de développement de l’habitat significatif". Enfin, il devrait apporter des aides aux transports collectifs hors Île-de-France.

(1) à la différences des métropoles occidentales évoquées auparavant, Pékin a un taux de rejet de gaz à effet de serre deux fois supérieur à la moyenne nationale. Mais cette pollution est majoritairement d'origine industrielle (66% contre 10% à New York).
(2) New York, Londres, Chicago ou Amsterdam ont par exemple élaboré des plans d'action contre le changement climatique. Mais on peut également trouver des mesures "durables" au sein des Agendas 21 locaux ou dans les documents stratégiques généraux.
(3) à terme, en 2015, la ville de Masdar devrait accueillir 50 000 habitants et 1500 entreprises sur 6km2. Sa conception, qui se fixe les objectifs de zéro déchets et zéro émissions de CO2, a été confiée au cabinet Foster & Partners et sa construction a été lancée en 2008. Le coût des travaux est estimé à 22 Mds de $.
(4) Bâtie sur l'île de Chongmin d'une superficie de 86km2, Dongtan devrait accueillir à terme 500 000 personnes en 2050. Sa conception a été confiée au cabinet d'ingénierie ARUP. La soutenabilité du projet fait toutefois l'objet de critiques. Pour s'y plonger.
(5) la part des transport dans les émissions de CO2 varie cependant énormément selon l'offre en transports collectifs, le taux de motorisation, etc.. A Londres, elle est de 20%, mais à Sao Paulo, elle atteint 60%.
(6) Marina Pala, La ciudat sostenible, catalogue d'exposition, 1998
(7) l'effet de chaleur peut être compensé dès lors que le couvert végétal représente 20% de la superficie urbaine
(8) cette démarche fait suite au discours présidentiel du 11 décembre 2007 à Vandœuvre Lès Nancy qui prônait la création de "villes d’un genre nouveau [qui] devront être des laboratoires de la modernité urbaine". Elles s'adresse aux intercommunalités de plus de 100 000 habitants, dont la population est amenée à progresser de 30% ou de 50 000 habitants.

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Portail des Agendas 21 locaux
ONU Habitat, L'Etat des villes du monde 2008-2009
Nedialka Sougareva & nathalie Holec, L'histoire des villes durables européennes, 2002
Charte d'Aalborg des villes européennes durables, 2003

vendredi 27 mars 2009

La maîtrise foncière

Les projets d'aménagements peuvent être entravés par le manque de terrains, ainsi que par la spéculation qui les renchérit. L'expropriation et l'exercice du droit de préemption sont les deux procédures utilisées pour faire face à ces obstacles.

L'expropriation pour cause d'utilité publique, dont le statut général est fixé par l'ordonnance du 23 octobre 1958, permet le transfert forcé de la propriété d'un bien contre le versement d'une juste indemnité (1). La décision d'ouvrir l'enquête préalable revient à l'Etat, qui déclare également l'utilité publique de l'expropriation. Les personnes publiques, mais aussi personnes privées partenaires de certains projets d'aménagement, telles que les SEML, sont les titulaire de ce droit. Celui-ci peut être exercé pour un nombre de plus en plus étendu de motifs (article L. 21-1, Code de l'urbanisme), si bien que la jurisprudence retient avant tout des finalités illégitimes : intérêt financier ou intérêt privé exclusif, volonté de faire échec à la chose jugée. Le juge exerce également un contrôle de proportionnalité "maximum", où il met en balance les avantages et les inconvénients de l'opération, en prenant en compte la protection "d'autres intérêts publics" tels que la protection de l'environnement (CE 20 octobre 1972) ou la viabilité économique du projet. L'information du public sur la destination des terrains peut être restreinte, lorsque l'expropriation est réalisée pour la constitution de réserves foncières ou lorsqu'elle bénéficie d'un dossier d'enquête publique sommaire.

(1) celle-ci est toutefois calculée en fonction de la constructibilité du terrain plus que par rapport au prix du marché foncier.

droit de prémption : même de petite surface, les espaces en centre-ville comme celui-ci à Besançon peuvent représenter une opportunité pour les politiques communales (diversification des commerces, de l'habitat...)

Le droit de préemption (2) permet à une personne publique de se porter acquéreur d'un bien après que son propriétaire ait adressé une déclaration d'intention d'aliéner (DIA). Cette procédure a été instituée à titre temporaire dans les ZUP (1958) et dans les ZAD (1962), puis de manière permanente dans les zones d'intervention foncières (ZIF) créées par la loi foncière du 31 décembre 1975. Aujourd'hui, en vertu de la loi aménagement du 18 juillet 1985, les communes dotées d'un PLU opératoire peuvent instituer un droit de préemption urbain (DPU). Celui-ci s'applique aux territoires autrefois couverts par les ZIF et les ZAD. La loi d'orientation sur la ville du 13 juillet 1991 offre cependant à nouveau à l'Etat la possibilité de créer des zones d'aménagement différé (ZAD), qui se substituent au DPU et peuvent, à la différence de ce dernier, être établies dans des zones naturelles. Avant l'établissement d'une ZAD, et afin de bloquer plus efficacement la spéculation, une zone pré-ZAD peut être instituée par le préfet pour une durée maximum de deux ans. Les biens soumis au droit de préemption ont été élargis en 2005 aux fonds artisanaux et de commerce, mais il demeure encore de nombreuses restrictions (3). A l'heure actuelle, le taux de prémption effectif reste faible, aux alentours de 1%, ce qui s'explique par les faibles sommes à disposition des communes.

(2) Le droit de préemption peut être également employé dans les espaces naturels sensibles par les conseils généraux et les parcs naturels à des fins de protection de l'environnement.
(3) parmi les plus importantes, notons celle qui exclut du DPU les immeubles de moins de 10 ans

Des réserves foncières peuvent être constituées par certaines personnes publiques, à savoir l'Etat, les collectivités locales, les syndicats mixtes, les établissements publics d'aménagements et les établissements publics fonciers locaux [4]). Depuis 1983, les communes peuvent bénéficier de prêts dans les conditions du droit commun pour financer leurs acquisitions.

(4) instaurés en 1991 et soutenus par la loi SRU, les EP fonciers locaux peuvent être financés, outre les contributions des communes, par la taxe spéciale d'équipement, la participation à la diversité de l'habitat ainsi que des exonérations fiscales.

vendredi 20 mars 2009

La planification locale

Reprenant une distinction établie par la loi d'orientation foncière de 1967, la loi du 13 décembre 2000 institue deux types de documents. Leur procédure d'élaboration a été décentralisée depuis la loi du 7 janvier 1983.

Les schémas de cohérence territoriale (SCOT), qui succèdent au schémas directeurs, ont une visée prospective. Ils se présentent sous la forme d'un rapport qui dresse un diagnostic territorial, présente un projet d'aménagement et de développement durable et fixe des objectifs en matière d'habitat, de développement économique, de transports collectifs, de protection des paysages et de prévention des risques. Ils intègrent des cartes présentant la destination générale des sols et les sites à protéger.

Recouvrant un territoire d'un seul tenant, ils sont élaborés par des communes regroupées dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et approuvés après une enquête publique. L'EPCI doit nécessairement se prononcer sur leur révision ou leur maintien en vigueur dans un délai de dix ans après son approbation.

De nombreux documents doivent être compatibles (1) avec le SCOT, à savoir les PLU et les cartes communales, les programmes locaux de l'habitat (PLH), les plans de déplacements urbains (PDU), les plans de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) ainsi que les schémas de développement commercial. Il s'impose également à de nombreuses opérations, telles que les ZAC, les lotissements, les opérations foncières et les autorisations d'exploitation commerciale.

La jurisprudence administrative témoigne d'un contrôle assez souple des obligations de conformité. Cependant, des opérations ont déjà été annulées pour non-respect du zonage (ex : CE 17 décembre 1982 "Chambre d'agriculture de l'Indre") et un schéma directeur a été annulé pour non-respect du principe de précaution (TA de Lille 19 avril 2000 "Fédération Nord Nature").

Les plans locaux d'urbanisme (PLU) sont des documents réglementaires, qui ont succédé aux anciens plans d'occupation des sols. Ils se composent :
  • d'un rapport de présentation, qui démontre la compatibilité du PLU avec les normes supracommunales et comporte une étude d'impact environnemental.
  • d'un projet d'aménagement et de développement durable (PADD). Celui-ci comprend nécessairement des orientations générales, valables pour l'ensemble de la commune, mais il peut aussi contenir des orientations d'aménagement pour certains secteurs, opposables aux travaux et constructions.
  • d'un règlement, constitué de documents graphiques établissant un zonage (2) et d'un document écrit. Ce dernier, s'il est détaillé, peut contenir des prescriptions relatives à l'aspect extérieur des constructions, à la desserte, à la voirie, aux équipements publics, au COS (3).
  • d'annexes telles que la liste des emplacements réservés, des opérations d'utilité publique, des servitudes d'utilité publique, des lotissements, des prescriptions nationales, les plans d'exposition au bruit des aérodromes, les avis des personnes publiques consultées et les observations des associations agrées.

changement de style entre le POS (en haut) et le PLU (en bas). Ce dernier n'effectue pas un simple zonage : il exprime le projet urbain sous une forme plus dynamique.
source : Nantes métropole


Le PLU est approuvé après enquête publique. Les communes rurales peuvent quant à elle se doter de cartes communales, qui contrairement au PLU ne comprennent pas de règlement. Leur territoire est donc soumis au règlement national d'urbanisme.

(1) l'obligation de compatibilité, plus souple que celle de conformité, implique l'absence de contradiction avec les grandes orientations du SCOT
(2) on distingue parmi les zones urbaines : le centre historique (UA), la zone dense à proximité de ce dernier (UB), les zones de plus faible densité (UC), les zones de construction individuelles (UG), les bâtiments en rénovation (UG), l'emprise ferroviaire (UF). Les autres zones peuvent être à urbaniser (AU), agricoles (A) ou naturelles et forestières (N).
(3) le coefficient d'occupation des sols exprime le rapport entre la surface hors oeuvre constructible nette (SHON) (soit la surface brute diminuée de celle des combles, des sous-sol, des balcons, des surfaces non closes et des espaces de stationnement) et la superficie du terrain.

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Le PLU de la communauté urbaine du Grand Lyon et le SCOT de l'agglomération (en cours d'élaboration)
Le PLU de Paris fait actuellement l'objet d'une révision
Le SCOT de l'agglomération de Strasbourg, qui s'applique à un espace transfrontalier

jeudi 19 mars 2009

La politique de la ville

C'est durant les années 70, au moment où se révèlent les impacts négatifs des grands ensembles (1), que naît ce qu'on appelle aujourd'hui la politique de la ville. Mêlant urbanisme, éducation, lutte contre la délinquance, action sociale et économique, elle vise à rénover les quartiers dégradés et intégrer les populations qui y vivent. Un comité interministériel "Habitat et vie sociale" permet à partir de 1977 d'entamer des opérations de rénovation.

Au début des années 1980, des troubles éclatent, ainsi que dans la cité des Minguettes à Vénissieux (été 1981). Une série de rapports (2) débouche alors sur la politique de développement social des quartiers. Environ 150 quartiers font l'objet d'un contrat de plan Etat-région sur la période 1984-1988. Parallèlement à cela sont crées les zones d'éducation prioritaire (1981), les missions locales pour l'emploi des jeunes, les conseils communaux et départementaux de prévention de la violence. Un fonds social urbain a été créé pour financer certaines de ces mesures. Au niveau institutionnel, la politique se dotait d'un Conseil national des villes (force de proposition), d'un Comité interministériel des villes (instance de décision) et d'une instance exécutive, la Délégation interministérielle à la ville (1988). Puis, en 1990, Michel Delebarre est nommé à la tête du premier Ministère de la ville. Il est assisté au niveau local par des sous-préfets chargés de la politique de la ville et dispose de crédits propres à partir de 1994.

Des émeutes continuent cependant à se déclencher à Vaulx-en-Velin (octobre 1990) ou au Val-Fourré à Mantes-la-Jolie (juin 1991). Peu à peu apparaît la nécessité d'une politique à l'échelle de la ville entière. La loi sur la solidarité financière de 1991 attribue aux communes en charge d'un nombre important de logements sociaux une dotation de solidarité urbaine (3). Si les contrats de plan 1989-1993 maintiennent la procédure de développement social des quartiers, ce sont des contrats de ville ou d'agglomération qui sont signés pour les périodes 1994-1999 et 2000-2006. Ces contrats, qui ont pu revêtir la forme d'opérations de renouvellement urbain (ORU) ou de Grands projets urbains / Grands projets de ville plus ambitieux, ont été remplacés par des contrats urbains de cohésion sociale pour la période 2007-2013.

Renouvellement urbain

La loi d'orientation pour la ville de 1991 instaure l'objectif de mixité sociale, que la loi solidarité et renouvellement urbain de 2000 reprend en instaurant un seuil de 20% de logements sociaux (4). Prenant acte d'un rapport critique de la Cour des Comptes, la loi d'orientation et de programmation pour la ville de 2003 infléchit la politique de la ville en lançant un programme de rénovation urbaine dans les ZUS, coordonné par l'ANRU (5).

démolition de la tour Lavoisier à Montereau - "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme" - source : RFI

Insertion professionnelle et développement économique

Le soutien économique à été intégré de manière tardive à la politique de la ville, avec la création des premiers Plans locaux pour l'insertion et l'emploi (PLIE). Par la suite, le Pacte de relance pour la ville de 1996 a défini des zones urbaines sensibles (ZUS), dont certaines, les zones de redynamisation urbaine (ZRU) et les zones franches urbaines (ZFU) peuvent bénéficier d'avantages économiques (6). Après les émeutes d'octobre-novembre 2005 est votée la loi pour l'égalité des chances de 2006, qui renforce, entre autres mesures, le nombre de ZFU.

Reportage vidéo de 1994 : L'histoire du quartier des Minguettes



(1) la circulaire Guichard limite en 1973 la création d'ensembles de plus de 2000 logements.
(2) rapport Dudebout de la Commission nationale pour le développement social des quartiers, rapport Schwartz sur l'insertion sociale et professionnelle des jeunes, rapport Bonnemaison de la Commission des maires sur la sécurité
(3) il s'agit désormais de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, dont les modalités de calcul ont été revues : elle accorde ainsi moins d'importance à la présence de ZFU et de logements sociaux sur le territoire de la commune
(4) cette mesure est assortie d'une disposition contraignante : les communes qui n'atteignent pas ce seuil doivent s'acquitter d'une taxe de 152 euros par an et par logement manquant.
(5) un programme de rénovation d'un coût de 30 milliards d'euros a été conduit à partir de 2004. 200 000 logements sociaux doivent être détruits, 200 000 reconstruits et 200 000 restructurés.
(6) les ZRU et les ZFU bénéficient d'exonérations (impôt sur les bénéfices, taxe professionnelle, cotisations sociales, cotisations patronales) et d'aides (au démarrage, à l'investissement...) accordées par un fonds de revitalisation économique géré par la préfecture. Celles-ci peuvent être augmentées dans les entreprises employant plus du tiers de leur personnel dans les ZFU d'une agglomération. Il existe 751 ZUS en France, rassemblant 4,5 millions d'habitants. Aux 44 ZFU d'origine se sont ajoutées 41 ZFU créées par la loi de 2003 et 15 autres créées par la loi de 2006 pour l'égalité des chances. Leur durée de vie a été prolongée jusqu'à la fin de l'année 2011. Les zones prioritaires sont définies en fonction de critères urbains (enclavement, forme urbaine, logement...), économique (taux d'emploi, offre commerciale) et sociaux (réussite scolaire..)

dimanche 15 mars 2009

Paris cherche ses limites - 5

Aujourd'hui, quelle forme administrative pourrait prendre la communauté du Grand Paris ?

Il faut pour cela s'entendre sur plusieurs points. Difficile, tout d'abord, de s'accorder sur un périmètre en particulier dans la mesure où - les travaux de Frédéric Gilli et Paul Chemetov l'ont montré (1) - la métropolisation s'effectue à différentes échelles. Si celle de la région Île-de-France (12 000 km2 dont 80% de territoire rural) semble trop vaste, la définition des zones urbaines fait apparaître un profil éclaté tandis que celle de l'agglomération centrale reste également délicate. Lors de l'élaboration du SDRIF, l'IAURIF a toutefois défini une zone dense regroupant 137 communes (avec les arrondissements parisiens) et 6,6 millions d'habitants. Ce sont des dimensions comparables à celles du Grand Londres (1580 km2, 7,5 millions d'habitants). Mais pour des raisons pratiques, il convient certainement de partir des découpages administratifs existants. Or, le projet de Grand Paris du rapport Dallier s'approche également, de ce seuil, sur le périmètre de la petite couronne (environ 750 km2 et 6,4 millions d'habitants). Toutefois, on peut se demander s'il ne faudrait pas adjoindre à cette entité des équipements tels que l'aéroport de Roissy.

Délicat, ensuite de définir la liste des compétences que pourrait exercer cette communauté. Certes, en se basant sur un sondage réalisé auprès des maires de petite couronne, Philippe Dallier préconise de lui attribuer la charge du transport, du logement, du développement économique et de l'environnement. Mais, comme pour tout ce qui touche à l'administration locale, il importe de délimiter ces compétences par rapport à celles des collectivités locales existantes et de l'Etat.

La question du statut administratif et du financement de cette future communauté soulève enfin de nombreux débats. Faut-il créer fusionner les EPCI existants dans une intercommunalité unique ? Quelle en serait alors la forme : communauté d'agglomération, communauté urbaine, collectivité à statut spécial ? Des élus de banlieues, comme Patrick Braouzec, président de la communauté d'agglomération de Plaine commune, se prononcent pour un modèle polycentrique composé de 7 ou 8 intercommunalités autour de de Paris. Certains experts tempèrent également l'idée qu'il est nécessaire de créer une institution unique à l'échelle de l'agglomération et mettent en avant l'idée d'une complémentarité entre l'Etat, les établissements intercommunaux et les agences techniques (3). De plus, la création d'une communauté du Grand Paris aurait un coût important pour l'Etat, si ce dernier devait lui reverser l'équivalent de la dotation qu'il verse aux communautés urbaines déjà existantes. Elle serait également coûteuse pour les communes et intercommunalités les plus riches, qui, si elles devaient réaligner leur taux d'imposition, pourraient craindre le départ de certaines entreprises. Le modèle du Syndicat mixte Paris métropole, qui rassemble depuis février 2009 75 entités (4), représente peut-être une alternative viable au Grand Paris, dont la réalisation a été suspendue par le Président de la République. Dernier-né de la politique de rapprochement entre Paris et les communes de banlieue, il témoigne de la nécessité d'une approche par étapes. Mais il est trop tôt pour dire s'il représente une forme de gouvernance capable de répondre aux enjeux de la capitale.

(1) Paul Chemetov & Frédéric Gilli, Une région de projets, l'avenir de Paris, juin 2006. Selon que l'on prenne comme critère de centralité la densité d'emploi, la densité de population ou encore le tissu industriel, la zone définie peut aller d'une partie de la petite couronne à tout le bassin parisien. De plus, les densités ne se déploient pas toujours selon un gradient à partir du centre historique : elles sont parfois éclatées (pôles universitaires, nouvelles technologies...).
(2) le coeur d'agglomération a été défini comme "l'ensemble des communes en continuité de bâti avec Paris, qui sont urbanisées (80% d'espaces urbanisés au MOS 1999) et denses (au moins 80 habitants + emplois /ha urbain construit)"
(3) "l'Île-de-France semble pouvoir se passer de pilote, dans la mesure où elle est dotée d'agences - ce qui paradoxalement, lui donne un profil contemporain dans le registre de la gouvernance" - Philippe Estèbe , "L'Île-de-France est-elle un objet de gouvernance ?" paru dans la revue Esprit d'octobre 2008
(4) Fondé à la suite des protocoles d'accords bilatéraux et de la Conférence métropolitaine, qu'il remplace, le syndicat Paris métropole rassemble 54 communes, 15 EPCI, 5 conseils généraux et le Conseil régional d'Île de France.

jeudi 5 mars 2009

Recoller les morceaux : le comité Balladur et le puzzle administratif français

Edouard Balladur - source L'Express

La publication du rapport du Comité pour la réforme des collectivités locales, présidé par Edouard Balladur a été précédé la semaine dernière d'une grande agitation dans les médias et au sein desdites collectivités locales. Aujourd'hui, son contenu est public et l'on peut se faire sa propre idée du bouleversement annoncé, qui pourrait intervenir dès 2014 si ses orientations sont validées.

La commission Balladur s'est vue confier en septembre 2008 la mission de revoir la recette du millefeuille administratif français, dont la complexité est bien souvent critiquée : trop de niveaux (communes, intercommunalité, canton, pays, département, région, Etat) et des compétences pas toujours bien définies.

En ce qui concerne le premier point, le rapport propose la suppression des cantons et l'organisation d'élections communes aux départements et aux régions (1) d'une part et aux communes et aux intercommunalités d'autre part. Pour ce qui est de la répartition des compétences, il suggère l'attribution de la compétence générale aux communes. Dès lors, la commune serait en charge des équipements de proximité (écoles, crèche...), le département serait spécialisé dans l'action sociale et la région dans le développement économique, la formation professionnelle et l'éducation.

La commission prévoit aussi un plan d'économies, qui consiste notamment à supprimer les services déconcentrés de l'Etat dont les compétences recouvrent celles des collectivités locales. Cependant, ces économies ne seraient pas suffisantes pour couvrir la perte de la taxe professionnelle (8 milliards d'euros) et celle-ci devrait être compensée par un nouvel impôt sur la valeur ajoutée des entreprises et une révision de la base de la taxe foncière.

Enfin, le rapport prévoit des mesures facultatives, à savoir le regroupement volontaire des communes, mais aussi des départements et des régions pour que ces dernières constituent des unités de 4 à 5 millions d'habitant et la création de 11 métropoles, dont le statut leur permettrait d'exercer les compétences sociales du département. Enfin, la commission reprend les recommandations du rapport Dallier en se prononçant pour la fusion des quatre départements et des intercommunalités de Petite couronne au sein du Grand Paris.

(1) une partie seulement de ces "conseillers territoriaux" siégerait à la région

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Le site du Comité pour la réforme des collectivités locales